La perte de la Lomellina se place dans le contexte des
guerres d'Italie.
Entre 1494 et 1546, les armées à la solde des rois de France
(Charles VIII, Louis XII, puis François Ier) ont poursuivi le mirage
italien et combattu des coalitions diverses dirigées par Ferdinand
d'Aragon, le Pape ou Charles Quint.
Ces guerres déplacent des armées nombreuses et sont caractérisées
par l'emploi de l'artillerie de campagne qui nécessitait un train (contexte
: convoi) considérable.
La plupart des opérations mobilisaient non seulement un grand nombre
d'hommes d'armes, mais aussi des flottes très importantes (42 000 hommes
sous Charles VIII et près de 80 bâtiments en 1494). La flotte
était utilisée non seulement pour combattre sur mer, mais aussi
pour soutenir les opérations terrestres en transportant les troupes
(un quart des combattants au cours des campagnes de Charles VIII) et le matériel
: artillerie et munitions, vivres et d'approvisionnements divers, et en servant
de couverture en tirant sur les ouvrages défensifs ou les forteresses
littorales pour permettre l'assaut des places fortes côtières.
Faute d'un nombre suffisant de navires royaux, le Roi fait appel à
des navires et même, pour la plupart du temps, à des chefs d'escadre
étrangers. Les navires marchands sont affrétés aux frais
de la couronne et les navires étrangers, souvent génois, sont
nolisés. On emploie alors aussi bien les galères que les navires
ronds : nefs pour l'essentiel, venant aussi bien du Levant que du Ponant.
Le rôle que joue Villefranche dans ces opérations est notable.
C'est la dernière rade abritée avant que les troupes n'abordent
la difficile route littorale qui longe la côte de Ligurie. C'est aussi
là que s'embarque tout ce qui est destiné à soutenir
la marche des armées.
La rade offre un abri suffisamment sûr et surtout suffisamment grand
pour en faire un lieu de concentration de toute flotte (de quelque importance)
relativement importante qui viendrait à opérer dans la région.
Villefranche est aussi, en liaison avec Nice, un port de construction navale.
Les navires construits et lancés sur la plage de Nice viennent en rade
pour y être terminés et armés. C'est aussi un port de
carénage comme l'indique le nom de baie de l'Espalmador : espalmer
étant l'une des opérations du carénage.
C'est l'importance de la rade qui est au centre des évènements
qui s'y déroulent.
- En 1295, le comte d'Anjou décide de créer Villefranche et
d'y baser ses navires destinés à percevoir les droits de passage
des navires marchands.
- En 1388, Villefranche est rattachée à la Savoie.
- En 1431, le duc de Savoie y arme une flotte,
- En 1440, le duc de Savoie accorde au duc de Bourgogne, qui n'a pas d'accès
à la Méditerranée, le droit d'y armer des navires marchands
et quatre galères pour en assurer la protection,
- De 1522 à 1530, chassés de Rhodes, les Hospitaliers de Saint-Jean
de Jérusalem s'y installent et y arment caraques et galères
dont la Santa Anna, la grande caraque de l'ordre, qui avait été
construite en 1522 sur la plage de Nice.
La contrepartie de son importance stratégique fait que la rade est
souvent un lieu d'affrontements dans cette même période.
- En 1504, un vaisseau génois y est attaqué par une petite escadre
Florentines,
- En 1507, les génois, révoltés, assiègent Monaco
et leur flotte vient mouiller à Villefranche,
- En 1522, la flotte française, assemblée à Marseille,
s'abrite à Villefranche et combat ensuite, sous les ordres d'Andrea
Doria, la flotte de Charles Quint devant l'embouchure du Var,
- En 1524, le connétable de Bourbon pénètre en Provence
et, au passage, attaque Villefranche où son armée s'empare des
navires des Hospitaliers, bien que ceux-ci aient été désarmés,
- En 1529, Charles Quint débarque à Villefranche,
- En 1543, Barberousse, appelé à l'aide par François
Ier, assiège Nice et mouille sa flotte à Villefranche en compagnie
des français.
Cependant, nous le verrons, la perte de la Lomellina
ne sera pas due à l'un des multiples combats qui se sont déroulés
dans la rade mais à une tempête soudaine, un ouragan survenu
au mois de septembre 1516.