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L'Arsenal d'Alger

 
 

Les fondateurs de la première cité arrivèrent par la mer : au milieu du IVe siècle av.jc., les Phéniciens établirent un comptoir, simple relais de leur commerce maritime.
Le vaste réseau des échanges méditerranéens, fut donc à l'origine de la création d'Alger. La ville s'appelait alors Ikosium, "l'île aux mouettes".

Les Romains débarquèrent à leur tour au Ier siècle de notre ère et établirent Icosium, fondation urbaine structurée par les deux grandes voies caractéristiques de leurs villes, le cardo (axe nord-sud) et le decumanus (axe est-ouest). Port naturel relativement abrité et doté de ressources en eau, Icosium avait une situation stratégique le long d'un intense trafic maritime qu'elle contrôlait en partie.

Bologhine Ibn Ziri appartenant à l'une des tribus berbères sanhadjias, les Banu Mezghana, fait d'Alger une véritable capitale dès la fin du Xe siècle. C'est principalement la ville haute qui se développa, mais elle fut nommée Al-Djazâir (les îles), le site côtier originel étant constitué d'un chapelet de rochers insulaires.

A l'arrivée des frères Barberousse en 1516, redoutables corsaires ottomans appelés par le Cheikh Salim Toumi pour mettre un terme à la menace espagnole, la médina ne disposait pas d'un véritable port malgré l'importance de ses échanges maritimes.
Une fois le pays placé sous le protectorat de Sélim Ier, sultan de Constantinople, Khayr al-Din fit donc construire le premier port pour d'abriter la flotte turque des fréquentes tempêtes et assurer la sécurité indispensable à l'activité économique de la Régence, essentiellement basée sur la course.

Dès 1530 il fit ériger un premier môle est-ouest qui reliait les îles à la médina. Ce môle fût doté d'un large mur pour protéger navires et gens de mer et fût complété rapidement par un second môle d'orientation nord-sud.

La protection du port, le développement d'un arsenal et l'organisation défensive du front de mer, constituèrent les principaux objectifs des gouverneurs successifs.

Dès 1533 Hassan Agha face à la menace de l'Armada espagnole, fit construire les premières batteries sur l'île principale et fit mettre en place quelques canons sur le môle. Juste avant l'attaque de Charles Quint en 1541, le port était encore à l'état embryonnaire.

Dès 1572, menacé par Don Juan d'Autriche, Arab Ahmed prolongea les murs de Khayr al-Din : l'ouvrage encerclait le Grand môle pour faire face à d’éventuels débarquements ennemis. Il fit ajouter les deux premières tours du port, la tour de la lanterne (Bourj al-Fanar) et la tour du "bout de l'île" d'où l'on veillait la nuit (Bourj Ra's al-Moul).

A la fin du XVIe siècle, Diego de Haêdo décrivait le grand arsenal d'Alger comme étant situé près de la Bab al-Bahr (porte de la Mer) et constitué d'une large place arrondie cernée de murs, où l'on construisait une partie des galiotes et des bateaux. D'après l'auteur, 60 galères mouillaient alors dans le port d'Alger.
Dans la partie de l'enceinte qui longeait la mer, s'ouvraient plusieurs portes : la porte de la Marine, la porte de la Pêcherie et celle de l'Arsenal, Tarsâna, qui située près de la Douane, était dotée d'une double entrée en arc.

Fray Melchor captif à Alger en 1613, précisait que par les portes de cet arsenal situé à l'intérieur des murailles de la ville, pouvaient sortir de très grands navires, même mâtés. L'un des deux arcs de cette porte qui était partiellement fermé par un mur de terre était abattu lors de chaque mise à l'eau d'une galère neuve. L'autre arc était doté de grilles de bois fermées la nuit.
Fray Melchor ajoutait que le môle principal du port s'étirait de la Bab al-Djazira jusqu'au château de la Marine. Les chariots y circulaient depuis l'embarcadère où étaient déchargées les prises et les marchandises importées, ensuite stockées dans des magasins situés près du château. A cet endroit, une placette protégée permettait la mise à sec des brigantins, galères et barques pour le radoub.
Dans l'angle formé par le changement d'orientation du môle, très large, les navires de la Régence se serraient les uns contre les autres et s'amarraient à des demi-colonnes. L'entrée du port orientée au sud, était fermée tous les soirs à l'aide d'une chaîne tendue entre l'extrémité du grand môle et un rocher affleurant situé près de la grande mosquée.

Le captif portugais J. Mascarenhas séjourna à Alger dans les années 1620 et décrivit le môle comme un ouvrage très bien construit, si haut qu'il pouvait couvrir jusqu'aux hunes des navires et si large que chaque navire pouvait y déposer tout son lest, son artillerie et ses barils d'eau. Il estima les dimensions de l'arsenal à une place d'une largeur de cent pas qui s'enfonçait dans la ville, sans communiquer avec elle par aucune porte.

Au XVIIIe siècle, l'état de la ville d'Alger étant décadent, peu d'informations concernant l'arsenal, la ville et son espace littoral sont disponibles.

Cependant, la marine d'Alger retrouva un certain dynamisme à la fin du siècle grâce à l'ardeur des capitaines comme le Raîs Hamidou, dernier grand capitaine corsaire : en 1802 il capturait une frégate portugaise de 44 canons et ses 282 hommes d'équipage ! Entre 1802 et 1815, plus de 1500 esclaves furent conduit à Alger !

En 1830, l'occupation d'Alger qui se voulait au départ purement militaire, avait pour but de mettre fin à la menace corsaire dont le port était leur centre d'activités. Mais dès 1831, les projets de transformation concernaient le port et la partie basse de la médina : la transformation du refuge de corsaire pour créer un port moderne commençait, entraînant la destruction de l'arsenal historique d'Alger.


Rédacteur : M. Guérout     © GRAN 2005